CSS: «Les lesbiennes françaises sont très sexy!»

Le groupe brésilien «homo à 90%» (selon leurs estimations!) sera en concert samedi à Paris. Pour TÊTUE, Luiza et Adriano se livrent dans une interview très très très gay.

Ils ont explosé en 2006, avec un premier album foutraque et ultra dansant. Ils? Ce sont Lovefoxxx, Ana, Luiza, Carolina et Adriano, les Cansei de Ser Sexy, ou «fatigué d'être sexy» (d'après une citation de Beyoncé). Après un second album passé plus inaperçu, les CSS persistent avec bonheur dans les mélanges éclectiques avec le très réussi La Liberación, sorti en août dernier. Le groupe défendra ce nouvel opus samedi à Paris, pour un live qui se promet d'être chargé en énergie. Luiza, la guitariste, et Adriano, le batteur, guitariste et seul garçon de la bande, nous parlent du fait d'être out, de leur public homo et des riot grrrls.

TÊTUE: Vous êtes contents de ce nouvel -et troisième- album?
Luiza (en haut à droite sur la photo): Très contents! On a pris notre temps pour être sûrs d'être heureux du résultat. Nous avons essayé de faire un album plus pop, sans oublier qui nous sommes.
Adriano: On a eu des retours très positifs de nos fans sur Facebook et Twitter, ils ont tous adoré. On voulait vraiment faire un album pour les fans.

Le titre de l'album est La Liberación. La chanson dit «Grita mami, Para la liberación» («Criez les filles, Pour la libération»). Il s'agit de la libération des femmes?
Luiza: On peut le comprendre comme on veut. C'est plus un état d'esprit, être libre et faire les choses que l'on souhaite. Il peut s'agir de la libération des femmes, de la révolution homo...
Adriano: Le groupe est homo, disons à 90%. On vient du Brésil et c'est tellement homophobe là-bas!
Luiza: Ceci étant dit, on veut que le disque soit pour tout le monde...
Adriano: ...sauf pour les homophobes, les sexistes.... Ceux-là peuvent bruler en enfer!

Est-ce que le mouvement des Riot Grrrls fait partie de votre héritage culturel?
Adriano: Oui, oui, complétement. Quand j'étais jeune j'avais toutes ces K7 de Bikini Kill, des fanzines riot. Cela faisait du bien d'avoir accès à ça. J'étais loin au Brésil et pourtant j'avais l'impression de participer à ce mouvement américain. C'était très puissant. Et la musique était bonne! Il faut que la musique soit bonne. Si c'est répétitif, c'est chiant... C'est pour ça que notre musique peut parfois paraître un peu schizophrénique.
Luiza: Pour moi aussi, ça a été capital. Ana (la guitariste, ndlr) a un tatouage d'un album de Bikini Kill. Courtney Love, avec Hole, a été aussi très très importante pour moi dans les années 90 - plus que Nirvana. Il y a eu Peaches ensuite...
Adriano: Oui, je l'ai vue en live en 2003 et ça a changé ma vie! Elle était tellement excessive. On aurait dit qu'elle nous disait «regarde tout ce que je peux faire, rien qu'avec mon corps!»

Vous êtes très populaires chez les lesbiennes et les gays. Et vous êtes tous les deux ouvertement homos?
Luiza: Oui. Durant nos concerts, il y a souvent un groupe de filles vers mon côté de la scène, des garçons vers Adriano... (rires) J'imagine que c'est important pour eux de voir des gens homos être sur scène, de voir que l'on peut être hors du placard et être heureux, avoir un boulot, servir de «modèle». Lovefoxxx (la chanteuse, ndlr) est hétéro, mais c'est une fille à pédés. Elle est très drag-queen!

Adriano: (très véhément) Je ne comprends pas pourquoi dans ce business il y a encore des musiciens qui restent dans le placard! Bien sûr, c'est pas l'aspect le plus important de ta vie, mais c'est quelque chose qui te constitue, donc c'est normal d'en parler. Au Brésil, c'est considéré comme tout à fait normal d'être homophobe. Quelqu'un peut très bien dire à la télé «si mon fils était homo, je le tuerais», et ça ne pose pas de problème. Le racisme est sanctionné, mais pas l'homophobie; c'est absurde. C'est pour ça que je n'ai plus envie de vivre là-bas. Je vis entre Londres et mon pays d'origine maintenant.
Luiza: Ce sera le combat de notre génération je pense.
Adriano: Si jamais le groupe parlait réellement de ce sujet dans les médias brésiliens, les gens n'écouteraient même plus notre musique. J'ai beaucoup d'amis homos là-bas. On dit que les homos font 10 % de la population... Tss, tss, tss, moi j'ai plutôt l'impression que c'est 50%! (rires)
Luiza: Moi je vis à Berlin depuis quelque temps...

C'est une ville qui attire beaucoup de lesbiennes.
Luiza: Oui, c'est vrai qu'il y a des lesbiennes par centaines là-bas. Mais... (un peu gênée) Elles sont un peu garçon-manqué, c'est pas exactement mon type. En France elles sont plus sexy...

Vraiment?
Luiza: Oui. Vous mangez mieux... Les gens qui mangent bien sont sexy!
Adriano: Ça a quelque chose de très sensuel la nourriture... Sauf si on la mélange avec le sexe et là ça donne quelque chose de très bizarre! (rires)

Comment vous expliquez votre succès auprès des lesbiennes et des gays?
Luiza: Ils savent que l'on est homo et que l'on aime faire la fête! (rires)
Adriano: Quand on est homo, on doit affronter tellement de situations très dures; c'est normal que l'on ait envie de s'amuser.
Luiza: Il y a beaucoup de jeunes qui nous écrivent pour nous dire «je suis homo, et je déteste là où je vis, ça se passe mal à l'école, mais quand j'écoute votre musique, vous rendez ma vie plus heureuse». C'est touchant...

De quoi parle votre single City Grrrl, pour lequel vous avez collaboré avec le groupe gay SSION?
Adriano: C'est une chanson qui s'inspire de la jeunesse de Lovefoxxx. Elle habitait dans une petite ville intolérante. Elle est très flamboyante, elle avait envie de se colorer les cheveux, de «sortir avec ses amis homos» comme le dit la chanson. Et c'est vrai: quand elle était plus jeune, elle avait vraiment envie d'avoir des amis homos!

Vous avez dit que Cody, le chanteur de SSION, était votre «homo préféré dans tout l'univers»...
Adriano: Il est tellement punk! Il vit sa vie à fond, il fait plein de choses en même temps, il est talentueux dans des domaines très divers.
Luiza (s'adressant à Adriano): Quels autres homos on aime?
Adriano: Il y en a plein! John Waters, Bruce Labruce, Pet Shop Boys, Andy Bell d'Erasure, Ellen DeGeneres, Gossip... Au début de notre dernière tournée, on était dans les mêmes festivals que les Gossip. Du coup on a donné ensemble un «concert secret» Myspace, à Manchester. La scène a été complétement envahie par le public, Beth a enlevé ses vêtements, nous avions mis du maquillage noir sur nos dents... C'était complétement fou! Très cathartique. On s'était dit qu'il fallait qu'on fasse une tournée ensemble. Et finalement, après ça on s'est dit «nooooon, il ne faut surtout pas faire cette tournée ensemble, c'est trop intense, ça va nous tuer!» (rires).

Durant la préparation de La Liberación, l'année dernière, vous avez tweeté «Nous sommes très excités par notre nouvel album. Les homos... Vous allez vous éclater!»
(Ils explosent de rire)
Luiza: On se permet de parler comme ça aux homos mais c'est très amical. Au Brésil, on a l'habitude de s'appeler «bicha» entre nous, alors que ça veut dire pédé. «Bicha, tu veux voir ça? Bicha, tu veux faire ça?» C'est très gentil!
Adriano: On était très heureux quand on a fait cet album. C'est notre disque le plus gay je trouve. Je sais pas, c'est le titre, la musique... C'est nul de dire que les gays n'écoutent que de la house. C'est pas la seule musique homo!

Regardez les clips de City Grrrl et Hits me like a rock :

http://vimeo.com/31877093



Les CSS seront en concert samedi 3 décembre à la Gaîté Lyrique, à Paris, et le lundi 5 décembre au Botanique, à Bruxelles.

Photos: DR.

Par Rédaction mercredi 30 novembre 2011