Grande-Bretagne: les thérapies pour «guérir» de l'homosexualité au coeur d'un procès
Grande-Bretagne: les thérapies pour «guérir» de l'homosexualité au coeur d'un procès
Un journaliste britannique a piégé une psychothérapeute qui disait pouvoir l'aider à changer d'orientation sexuelle. L'appel interjeté par Lesley Pilkington auprès de l'Association britannique des conseillers et psychothérapeutes est entendu mercredi.Pour la première fois en Grande-Bretagne, une psychothérapeute pourrait être définitivement déchue de sa licence pour avoir pratiqué des thérapies de traitement de l'homosexualité. Lesley Pilkington (à gauche) a été condamnée au printemps dernier par l'Association britannique des conseillers et psychothérapeutes (BACP), l'organisme indépendant accréditant ces professions. Elle a perdu sa licence mais a fait appel, avec l'aide du Centre chrétien d'aide juridique qui assurait sa défense. L'audience reprend ce mercredi.
«Une maladie mentale, une addiction, un phénomène anti-religieux»
La psychothérapeute qui exerce depuis 20 ans a été piégée en 2009 par un journaliste ouvertement homosexuel et spécialisé dans les droits de l'homme. Patrick Strudwick (à droite) est venu à la séance avec un micro attaché sur le ventre. Le journaliste lui aurait notamment demandé si elle voyait l'homosexualité comme une «maladie mentale, une addiction ou un phénomène anti religieux». «C'est un peu de tout ça» aurait-elle répondu ajoutant qu'on devient gay à la suite de «gros traumatismes».
L'enregistrement en main, Patrick Strudwick a reporté l'incident auprès du BACP. L'association a jugé cette thérapie «absurde», et le Royal College of Psychiatrists a ajouté qu'elle «promouvait les discriminations».
A l'audience, devant un panel d'experts, Mme Pilkighton a défendu son traitement appelé «tentative de changement d'orientation sexuelle» (Sexual Orientation Change Efforts, SOCE). Cette technique venue des Etats-Unis propose notamment des «week-ends entre hommes hétérosexuels destinés à développer sa masculinité» avant de pouvoir «entamer des relations saines avec des femmes», a-t-elle expliqué. Elle aurait aussi conseillé à Patrick Strudwick de «jouer au rugby, de s'abstenir de se masturber et de ne plus fréquenter ses amis gays».
Entre 50 et 100 psys
Mme Pilkington s'est lancée dans cette méthode il y a dix ans pour «aider» son fils. «Il est hétérosexuel mais il a un problème d'homosexualité» a-t-elle analysé. Elle estime depuis avoir traité avec succès environ un gay par an. Selon Andrea Williams, la directrice du Centre chrétien d'aide juridique, il y aurait «entre 50 et 100 psychothérapeutes» proposant cette thérapie au Royaume-Uni.
L'audience a été ajournée le 18 janvier après que le Centre a accusé Patrick Strudwick d'avoir menacé leur témoin clef, «un expert international» de cette thérapie. Le journaliste nie. Mme Williams estime cependant que le BACP a manqué à ses devoirs en rendant son jugement avant d'avoir entendu «les bénéfices de cette thérapie».
Soutien de l'Eglise anglicane
Quel que soit la décision finale du BACP, Mme Pilkington ne sera pas interdite d'exercer. En Grande-Bretagne, n'importe qui peut se dire psychothérapeute. Malgré cela, l'affaire connait un grand retentissement outre-manche notamment parce que Mme Pilkington vient de recevoir le soutien de figures importantes de l'Eglise anglicane, toujours en proie à des tensions internes sur le sujet de l'homosexualité.
Par Marie Billon mardi 31 janvier 2012
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