Amel Bent: «Si deux personnes s'aiment, elles doivent pouvoir être ensemble»

RENCONTRE. À l'occasion d'un concert privé donné dans la foulée de la sortie du deuxième single de son quatrième album «Délit Mineur», TÊTUE a rencontré Amel Bent. Une chanteuse qui ne baisse toujours pas le poing et qui sait décidément parler à ses fans lesbiennes.



Elle arrive. Tout juste sortie de répèt', là-bas, au fond, dans la salle qui jouxte le café où elle nous a donné rendez-vous. Majestueuse sur ses talons, robe rouge et lunettes de soleil assorties. Pour nous, c'est un mélange d'appréhension et de hâte. Parce qu'elle nous a tellement touchées droit au cœur dès son premier tube, Ma Philosophie, qu'on a le sentiment de la connaître depuis toujours. On sait qu'avec elle, ça va forcément bien se passer. Et en même temps... Et si dans la réalité, Amel Bent n'était pas ce qu'elle nous renvoyait? Si elle n'était pas cette alliée qui nous a d'emblée semblé tellement naturelle à nous, ces filles elles aussi différentes?

«Version gouine» et poing levé
Quand elle nous invite, tout sourire, à déménager en terrasse pour profiter des derniers rayons du soleil, on sent toute sa douceur et sa franchise nous envahir, comme si rien ne pouvait nous arriver. Quand elle nous parle «sans complexe» de son poids, elle qui est récemment devenue l'égérie de Weight Watchers plutôt que d'une marque de cosmétique, on se surprend à emprunter un ton badin. Et lorsque, nous agrippant le bras, elle nous lance «Têtue? D'accord! La version gouine?» avant de partir dans un grand éclat de rire, on se détend définitivement et on descend d'un cran dans le fauteuil.

«Ben ouais, j'imagine bien que vous vouliez me rencontrer depuis longtemps, avec le poing levé, tout ça.» Tout ça, en effet. Souvenez-vous: «Je n'ai qu'une philosophie, être acceptée comme je suis/Avec la force et le sourire/Le poing levé vers l'avenir/Lever la tête, bomber le torse/Sans cesse redoubler d'effort/La vie ne m'en laisse pas le choix/Je suis l'As et pas le roi.» Par certains côtés, l'histoire de notre existence.

«Parmi mes fans, des couples de femmes se sont formés»
«Le plus beau cadeau que la vie puisse me faire, glisse la chanteuse, c'est qu'à travers ma musique je puisse aider les gens. Comme la musique m'a aidée moi, quand j'avais mes soucis d'enfant ou d'ado. Comme elle m'a apaisée, m'a remonté le moral, m'a donné envie d'y croire, m'a redonné l'espoir, le sourire, m'a aidé à pleurer quand j'en avais besoin. Avec Ma Philosophie, il y a des femmes qui m'ont écrit qu'elles avaient eu le courage de partir parce qu'elles se faisaient tabasser.»

Plus de sept ans et un quatrième album (Délit Mineur) plus tard, à 26 ans, Amel n'a pas coupé ce lien privilégié avec ses fans. Dont pas mal d'homos. «Mon premier fan, c'était mon meilleur ami et il était gay, se souvient-elle. Ce lien fort a commencé comme ça. Et puis, mon côté Mariah Carey y est peut-être aussi pour quelque chose! Avec la voix un peu «wooooooooo» (elle imite le célèbre vibrato). Parmi mes fans, il y a même des couples qui se sont formés. Hétéros et homosexuels. Dont des couples de femmes.»

Et le mariage des homos?
Quoiiiii? Des filles qui se sont rencontrées sur du Amel et grâce à elle? Mais cet entretien va même au-delà de ce que l'on imaginait! «Oui, poursuit la chanteuse. Des jeunes filles qui ne savaient pas trop ce qu'elles étaient, ce qu'elles aimaient... Elles se sont découvertes. Et... voilà, c'est vachement bien de pouvoir se coucher le soir en se disant "je sais pourquoi je fais ce métier". Parce que forcément, tu te poses des questions -je l'ai chanté dans ma chanson «Où je vais?»- tu te dis "est-ce que ce que je fais a un sens?", et puis quand tu as ça, ce genre de moments, ben tout prend son sens et tu dis (elle hoche la tête): "ah ouais"!».

Malgré un mode de pensée où ce qui compte plus que tout est «le respect, la tolérance et l'amour», ne comptez pas sur elle pour prendre publiquement position en faveur du mariage des homos, comme l'ont récemment fait Lorie ou Matt Pokora. Quoique. «En tant qu'artiste, et ça va sans doute vous sembler de la langue de bois, explique-t-elle, je ne suis pas pour lancer les polémiques ou y participer. J'en ai trop souffert.» Avant de lancer, ses yeux dans les nôtres: «Maintenant, ce que je peux dire sur le sujet c'est que quand deux personnes s'aiment, elles doivent être ensemble, voilà. Rien ni personne ne devrait avoir le droit de s'y opposer.»

Regardez le clip de Je reste:



Photos: Renaud Corlouer.

Par Myrtille Rambion mardi 27 mars 2012

Source : http://www.tetu.com