SEXO LESBO: «Il n’y a pas assez de personnes de couleurs dans le porno»

par **SweetAngel** Dim 11 Nov 2012 - 19:19

RENCONTRE. La réalisatrice de porno queer Nenna nous parle de la sous-représentation des noirs dans les films pour adultes, de religion et de sex-shop.

Fin septembre, Nenna (photo) était à Paris pour présenter son premier long métrage, Tigh places, a drop of color. Lors de la séance «P*Pride» organisée par Flozif avec La Playnight, les applaudissements sont enthousiastes. C'est que l'Américaine sait y faire: une belle image, des actrices avec une vraie présence... Du porno queer de très grande qualité.

Mais la particularité du travail de Nenna tient aussi au fait qu'elle souhaite représenter des actrices «de couleurs». Le titre de son premier long-métrage annonce bien l'ambition: «a drop of color», une goutte de couleur dans la production porno qui reste encore très blanche, ou qui présente des acteurs racisés pour mieux les fétichiser.

TÊTUE.com: Comment avez-vous commencé à faire du porno?
Nenna: Je travaillais avec ma famille dans l'industrie de la télévision, je savais donc filmer, j'avais une caméra à disposition. Je me suis rendue compte qu'il y avait peu de porno avec des personnes de couleurs. J'aime le porno et j'ai donc eu envie de créer ce genre de contenu.

La question de la représentation des personnes racisées est très importante dans votre travail...
Oui, les personnes de couleurs sont mal et sous-représentées dans le porno. Le porno est aussi un moyen pour les gens de se voir. Pas uniquement d'une manière sexuelle, mais aussi, tout simplement, nus. Le fait d'être nu est considéré comme du porno... alors que j'ai juste envie de pouvoir me voir! Les différents types de corps et les différentes ethnies sont fétichisés. Dans Tight places, a drop of color, il y a une personne noire, une autre est iranienne, une autre est amérindienne, une autre est latino-américaine. Dans mon deuxième film, Hella Brown, real sex in the city, le casting est entièrement noir.

Vos films sont faits pour que les personnes racisées se sentent plus fortes?
Oui, ils devraient les aider à se sentir plus fortes: tout d'abord parce que mes films sont faits par une personne de couleurs, d'ascendance africaine. Ils montrent aussi des personnes de couleurs. Troisièmement, nous employons beaucoup de personnes de couleurs lors de la production du film.

Vous avez ouvert un sexshop à Oakland, près de San Francisco, «Feelmore»...
C'est un mix entre un sexshop et un musée de l'érotisme, puisque que nous faisons aussi des expos d'art. Dans notre galerie, nous avons beaucoup d'objets qui sont des représentations des différents types de corps et des différentes ethnies. Aujourd'hui, j'ai visité un musée à Paris. J'ai vu des tableaux comme le sacre de Napoléon. C'était il y a plus de 200 ans, et c'est une image qui a été préservée. Quand tu regardes ces tableaux d'un point de vue d'une personne de couleurs, tu te demandes: où étaient-ils? Cette culture que j'ai vue dans ce musée n'avait pas préservé de représentations des personnes de couleurs.

Comment définissez-vous votre identité?
Je ne me définis pas, j'ai une identité très ouverte et c'est très bien. Même quand j'étais plus jeune, dans la communauté lesbienne, on me demandait si j'étais une stud ou une fem et je disais «ni l'une ni l'autre». S'il faut vraiment utiliser un mot ce serait «queer».

Vous êtes croyante. Comment avez-vous conjugué votre foi et votre travail?
J'ai étudié l'histoire et j'ai pu constater que l'érotisme ne date pas d'hier! Si je mets une peinture de Michel-Ange dans mon salon, c'est de l'art, c'est historique. Alors que si je me mets nue, c'est de l'érotisme. Faire du porno n'est pas très différent de ce que faisait Michel-Ange avec ses pinceaux sur les murs de la chapelle Sixtine. Mon travail et ma religion ne s'entendent pas l'un avec l'autre. Ou plutôt mon travail n'a pas de problème avec ma religion, mais l'inverse n'est pas vrai. Dans mon second film, vous pouvez voir des croix. Je dis aux personnes de ma communauté que je fais du porno, à mon pasteur, je vais à l'église. Il y a des personnes qui abandonnent leur religion, car celle-ci ne les accepte pas telles qu'elles sont. Si vous ne pouvez pas accepter une personne telle qu'elle est, vous la perdrez...

Photos: DR.

Par Rédaction dimanche 11 novembre 2012

Source : http://www.tetu.com