A Lyon, les enfants de parents homos ont créé leur association

INTERVIEW. La première association d'enfants de parents homos a vu le jour en avril dernier à Lyon, et compte bien se faire entendre dans le débat sur le projet de loi...

«Des enfants comme les autres» (DECLA), le nom est déjà un manifeste. Créée en avril 2012 à Lyon, elle est la première association française qui rassemble des enfants adultes de parents homosexuels. Entretien avec le président Alexandre Chevalier, 38 ans et lui-même père de trois enfants.



TÊTU.com: Il existe déjà des associations de familles homoparentales. Pourquoi une association d'enfants de parents homos?
Alexandre Chevalier: Nous avons créé cette association en pleine campagne présidentielle avec Raphaëlle Munier, parce que nous en avions assez d'entendre parler de notre réalité uniquement sous forme de chiffres ou de commentaires de pédopsychiatres. Personne ne s'intéressait à notre parole, alors nous nous sommes dit que nous allions la prendre nous-mêmes. Nous n'avons ni le même âge, ni la même histoire avec Raphaëlle, mais nous partagions cette envie-là. Créer une association, c'était une manière de se positionner dans le débat. C'était aussi la garantie de pouvoir se porter partie civile dans des cas d'homophobie.

Au-delà, il y avait aussi une volonté, pour ma part, de rendre hommage à mon père, de le défaire symboliquement de la honte avec laquelle il avait vécu. Il m'a annoncé son homosexualité et sa séropositivité quand j'avais quinze ans. C'était la fin des années 80. Il était déjà malade du sida et savait qu'il ne lui restait plus beaucoup d'années à vivre. Il avait vécu une double vie, marié avec ma mère tout en ayant un compagnon. Ma mère était au courant, puis moi, mais personne d'autre dans la famille élargie qui ne l'a appris que cette année, avec la création de l'association. En parler maintenant, c'est pour moi aussi une façon de poser ce secret dans lequel mes parents m'ont mis. J'ai eu l'aval de ma mère avant son décès, l'année dernière. Elle m'a dit: «Fais ce que je n'ai pas eu le courage de faire.»

Comment comptez-vous peser dans le débat actuel?
Nous avons été très sollicités par la presse depuis le mois de septembre. Nous avons participé à une quinzaine de reportages et d'émissions, que ce soit pour la presse écrite, la radio ou la télévision. Nous avons également été sollicité par le député Erwann Binet, rapporteur de la loi sur l'ouverture du mariage et de l'adoption aux couples homosexuels, pour une audition à l'Assemblée nationale le 20 décembre 2012.

Comment ressentez-vous le débat actuel?
J'ai le sentiment que ce qui est jugé, c'est l'homosexualité, et pas tant la capacité des homosexuels à être parents. Les opposants créent constamment la confusion entre deux choses qui n'ont rien à voir: la sexualité des adultes et l'éducation d'enfants. Ils mettent de la sexualité là où il n'y en a pas. Parce que la sexualité des parents, c'est le cadet des soucis des enfants!

Plus d'informations sur la page Facebook de l'association.

Par Taina Tervonen samedi 17 novembre 2012

Source : http://www.tetu.com