Clarika: «Aller manifester pour le mariage pour tous était une évidence»

Après près de 20 ans de carrière, Clarika revient avec un sixième album, «La Tournure des choses». Sur le canapé confortable d'un bar du Marais parisien, la chanteuse, hétéro mais très friendly, a accepté de répondre aux questions de TÊTUE.



TÊTUE: Qu'est-ce qu'il a de spécial pour vous, ce dernier album?
Clarika: De spécial je ne sais pas, chaque album est une continuité plutôt qu'une rupture, chacun m'accompagne. Mais c'est vrai qu'on a mis en avant un côté sombre qui n'était pas là avant. On le retrouve dans le premier morceau et dans le dernier, Tout est sous contrôle.

Il y est beaucoup question d'actualité... Comment vous l'expliquez?
On traverse un moment difficile, c'est une réalité. Et j'ai l'impression d'avoir dit beaucoup de choses sur moi, donc plus ça va et plus je m'autorise à aborder ce genre de sujets. Mais ça n'est pas simple, c'est pas parce qu'on a un micro qu'on est en droit de tout commenter. Dans la chanson Sumangali par exemple, j'avais pas envie de faire une dénonciation frontale parce que je suis moi-même dans un paradoxe: je dénonce, mais je suis bien contente de porter des vêtements moins chers fabriqués par des petites filles du Bangladesh.

Pourquoi ce changement radical entre cette pochette d'album où l'on vous voit sur la plage en costume noir et chemise blanche, et la précédente (Moi en mieux, 2009) qui affichait une fille sublime blonde au dos tatoué (visuels ci-dessous)?
Là pour le coup, c'est une vraie volonté de rupture. J'avais envie d'un décor un peu plus erratique qui pousse à se poser des questions, qui aille avec le côté sombre de cet album.



Ici vous êtes plus androgyne, on pense à la chanson Fais-moi mâle, où vous vous mettez dans la peau d'un garçon... D'où vous vient cette envie?
J'ai jamais rêvé d'être un garçon, par contre ça m'interroge, je pense que c'est forcément une curiosité qui nous passe par la tête.

Si vous pouviez être un homme qui existe, ce serait qui?
Je crois que j'aimerais être David Bowie pour voir ce que ça fait! Mais dans le fond, cette interrogation chez moi c'est plus une quête de sensations que de représentation.

Et une autre femme?
C'est une belle question. J'aimerais être une femme qui a lutté pour des idéaux, un absolu, qui a vraiment pris de son temps pour ça. On a tous plein de bonnes intentions mais on n'est pas forcément à la hauteur. Chanter pour défendre quelque chose, c'est chouette, mais je trouve qu'il n'y a pas tellement de mérite à le faire.

Regardez le clip de Oualou, extrait de son dernier album:



Vous vous considérez comme féministe?
On me pose beaucoup la question. Je viens d'une génération qui a lutté. Ma mère était militante, mais de mon petit point de vue, en France et dans la chanson même, je n'ai pas eu besoin de me battre. Quand je suis arrivée c'était plutôt un atout d'être une femme dans la chanson. Je sais que tout n'est pas gagné mais je ne subis pas le fait d'être une chanteuse.

Vous avez signé en décembre une pétition de soutien au mariage pour tous. Pour quelles raisons?
C'était une nécessité et une évidence. Je me sens hyper concernée, j'ai des filles qui sont elles-mêmes très sensibles à ça, donc j'ai signé vraiment sans me poser de questions et je suis allée manifester.

Vous avez des projets en parallèle de votre tournée?
J'ai créé un spectacle aux Correspondances de Manosque, un festival littéraire. J'ai mis en relation des chansons à moi avec des textes de romancières: Nancy Huston, Taslima Nasreen, Nathalie Sarraute... Je devais le jouer une ou deux fois et en fait on en est à une quarantaine de dates. C'est un contre-pied à ce que je fais d'habitude, c'est beaucoup plus intimiste.

La Tournure des choses, de Clarika (At(h)ome/Wagram Music, 2013).
Clarika sera en concert demain et après-demain à Paris, au Café de la Danse.


Photos: Clarika par Thierry Rajic/DR.

Par Charlie Vandekerkhove mardi 26 février 2013

Source : http://www.tetu.com