ShangaiPride (1/2): Les tribulations des Sœurs de la Perpétuelle Indulgence dans la Chine LGBT
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ShangaiPride (1/2): Les tribulations des Sœurs de la Perpétuelle Indulgence dans la Chine LGBT
Sœur Rose de Paname raconte…
Groupe militant LGBT hors norme, les Sœurs de la Perpétuelle Indulgence lutte à sa façon contre le sida depuis 35 ans. Huit d’entre elles ont pu se rendre à la Shangai Pride qui s’est tenue du 13 au 22 juin dernier: Sister Vicious Power Hungry Bitch, Vish-New, une des fondatrices, Sister Risqué, Sister Roma, Sister Eden, Sister Flatulina, Pope Dementia the Last, de San Francisco ainsi que Schwester Katharina, de Berlin et Sœur Rose, de Paname. Cette dernière raconte pour Yagg ses folles journées dans l’empire du milieu.
« Quand j’ai appris qu’un Néerlandais nommé Hans Clerkx, aidé de Rob Verf, avait pour projet de faire venir huit Sœurs de la Perpétuelle Indulgence à la sixième édition de la ShanghaiPride, je me suis dit, c’est un fou furieux. Mais ça tombait plutôt bien, parce que niveau follitude furieuse, les Sœurs, on s’y connait. Depuis 1979 et notre première sortie dans le quartier gay de San Francisco, nous avons toujours mis un point d’honneur à être là où l’on ne nous attendait pas. Alors la Chine, pourquoi pas?
En Chine vivent 20% des «homolesbitrans» et si le pays s’ouvre peu à peu, le poids des traditions et d’un gouvernement pas hypra-open des chackras en matière de droits humains rendent les choses si simples de la vie bien plus compliquées.
Depuis 2008, le sida est devenue la maladie la plus meurtrière de Chine et la pandémie ne fait qu’empirer. Pour vous donnez une idée, dans les années 90, le gouvernement communiquait autour de la «morale sexuelle saine» et ne surveillaient que les usagers de drogues et les prostituées.
Pour ces raisons et des centaines d’autres, notre présence en Chine nous a paru justifiée. Et bien ce fut au delà de toutes nos attentes. Si vous vous attendez à une grande marche en plein cœur de cette mégalopole de 23 millions d’habitants, vous allez devoir patienter un peu. La ShanghaiPride consiste en une semaine de panel de discussions, d’un festival de films (doté d’une exquise sélection), de pièces de théâtres et bien sûr de quelques fêtes. Tout cela ayant lieu dans des lieux clos, avec le soutien des différents consulats européens et nord-américains.
LA MAGIE DES SŒURS VA-T-ELLE FONCTIONNER?
Toute l’histoire de ce voyage est celle de rencontres. ShanghaiPride ne connaissait pas les Sœurs de la Perpétuelle Indulgence, nous ne connaissions pas ShanghaiPride. Avant même d’arriver, nous avions déjà tous hâte de nous rencontrer, de voir si la magie des Sœurs, qui fonctionne si bien depuis 35 ans, allait également marcher dans un pays à l’histoire, aux traditions, à la culture si différentes des nôtres.
La première rencontre eut lieu lors la soirée d’ouverture. Une boite de nuit, tenue par des Russes dans un centre commercial, recevait l’événement. Nous devions monter plusieurs étages à l’aide d’escaliers mécaniques, ce qui laissa pleinement le temps aux gens de nous observer de loin, puis de plus en plus près. Et croyez moi huit frangines, ça se remarque et un centre commercial, foutre que ça résonne. Notre arrivée est donc épique. Nous rencontrons énormément de jeunes Chinois ne parlant pas un traitre mot d’anglais. Si vous pensez que c’est la barrière de la langue qui allait nous bloquer, c’est mal nous connaître. En quelques instants, chaque Sœur trouve sa place. Certaines se jettent sur la piste de danse et font littéralement danser toute la boite, tandis qu’une autre se lance dans une tournée de bisous et de sourires auprès de toutes les personnes qui croisent son chemin, une autre tient le bar en papotant, d’autres encore squattent le fumoir. Bref, les Sœurs sont partout et la magie opère, ouf.
ÊTRE TRANS’ EN CHINE, C’EST JUSTE UN POÈME
Le lendemain, après une courte nuit – que dis-je, sieste – nous passons aux choses sérieuses.
Au Consulat étasunien se tient une discussion sur les trans’. Être trans’ en Chine, c’est juste un poème. Sur la capacité de torture psychologique que l’être humain peut imposer à ses semblables. Si l’homosexualité est dépénalisée et dépathologisée, les trans’ nagent dans un vide juridique et une pathologisation des plus délicieuses. Le gouvernement ne prend pas clairement position sur le sujet. En gros, il fait pas chier si tu fais pas chier, mais après, va définir «fais pas chier» dans une dictature communiste. Cette invisibilisation des trans’ n’est pas que le fait du gouvernement mais aussi des différentes organisations LGB qui ne s’intéressent que rarement à ces questions.
Il faut être âgé de 20 ans au minimum pour entamer un parcours de transition. Mais il faut pouvoir justifier de deux ans dans le genre d’arrivée avant d’entamer le dit parcours. Pour entamer les démarches, vous êtes obligé.e de retourner dans votre lieu de naissance. Dans le troisième pays au monde, en superficie, avant même les Etats-Unis, c’est juste un cadeau. Et si dans certaines villes, la foule vous anonymise, dans certaines parties plus rurales, tout le monde se connait et vous reconnaît. ChoupiBonheur.
Si vous pensiez qu’il y a la moindre loi pour protéger d’une certaine discrimination, laissez moi vous dire que c’est pas le doigt, mais le coude que vous vous mettez dans l’œil. Une fois venu à bout de votre transition, de vos changements de papiers et tout le toutim, il vous reste vos diplômes. Car en Chine, on ne change pas un nom sur un diplôme. Jamais. FélicitéInfinie.
Donc de là à dire que la discrimination est encouragée, y’a qu’un pas et je ferais un entrechat.
À la rubrique des conditions ubuesques vous avez celle de ne pas être marié.e, anyway on demande leur avis à tes parents, et à la police aussi. Parce qu’il te faut un joli casier judiciaire aussi vierge que Bernadette Soubirou. Ah, et qui parcours ne dit pas forcément hormones de qualité et il est souvent nécessaire de se fournir au marché noir.
Je vous propose une petit pause musicale, le temps de vomir. Il s’agit de Mao Ning – 毛宁 – Chanteur très populaire et sensible.
Si le lecteur ne s’affiche pas, cliquez sur 毛宁 涛声依旧
Le programme des Nations Unies pour le développement (UNDP) est en train de mener un état de lieux dans le pays afin de pouvoir faire un travail d’information le plus efficace possible. Dans un pays qui applique la politique de l’enfant unique, où avoir une fille signifie payer une dot et un garçon la possibilité de transmettre un nom, un patrimoine, tu la vois la réaction des parents quand leur enfant leur dit : « Je suis MtF » ? La totalité des intervenants sont d’accord sur une chose. L’urgence, aujourd’hui, concerne les enfants trans’.
À ma grande surprise, le consulat français n’est pas présent, alors que son soutien fut capital pour les cinq premières éditions. Après avoir mené ma petite enquête, le consulat était d’accord pour prêter une salle pour le festival de films à la condition de ne projeter que des films français et pas de films chinois.
Le cinéma chinois est en pleine mutation et nombreux sont les jeunes réalisateurs et réalisatrices qui choisissent de filmer leur quotidien, leurs amiEs, pour montrer que dans cette Chine si complexe, il existe mille et une façon de vivre et de s’aimer.
Parmi les œuvres présentées qui m’ont beaucoup marqué, il y avait le documentaire Brothers de Yao Yao et l’ensemble [url=http://yagg.com/2014/07/16/shangaipride-12-les-tribulations-des-soeurs-de-la-perpetuelle-indulgence-dans-la-chine-lgbt/ http://koreajoongangdaily.joins.com/news/article/article.aspx?aid=2990811]du travail de Fan Popo[/url].
À suivre…
Sœur Rose de Paname.
Photos DR
Publié par Yagg
Source : http://yagg.com/2014/07/16/shangaipride-12-les-tribulations-des-soeurs-de-la-perpetuelle-indulgence-dans-la-chine-lgbt/
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