Conférence de Rome sur le sida: et maintenant?
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Conférence de Rome sur le sida: et maintenant?
BILAN. De nombreuses avancées scientifiques sur l'utilisation du traitement comme prévention ont été présentées à la conférence sur le sida de Rome. Mais la question de la mise en œuvre de ces succès reste entière.
Le bilan de la Conférence sur le sida qui vient de s'achever à Rome - elle réunissait 5000 personnes du 17 au 20 juillet - est très paradoxal. Certes, les recherches sont relancées pour l'objectif «guérison» du VIH, avec de nouvelles données qui font penser aux chercheurs qu'il est atteignable (lire notre article). Et, on sait désormais avec certitude, a souligné le président de la conférence, le médecin ougandais Elly Katabira (ci-dessus), que «le traitement c'est de la prévention. La preuve est là: une personne séropositive qui reçoit un traitement antirétroviral efficace a très peu de risque de transmettre le virus». L'Organisation mondiale de la santé doit émettre avant l'automne de nouvelles recommandations prenant en compte ces résultats.
Mais la crise économique mondiale est passée par là. Mitchell Warren, le directeur d'AVAC, la coalition mondiale pour la prévention du sida, l'a très bien résumé: «autrefois, nous avions beaucoup d'argent, mais pas d'outils efficaces. Aujourd'hui, nous avons des résultats extraordinaires, mais plus d'argent.»
Baisse des financements
Précisément, Peter Piot, l'ancien directeur de l'Onusida, a dénoncé également le manque criant de financements. Après 25 ans d'effort continus, les ressources disponibles ont baissé en 2010. Une triste première. Et l'Italie, qui héberge la conférence, n'a pas versé les 260 millions d'euros qu'elle s'était engagée à donner au Fonds Mondial de lutte contre le sida, le paludisme et la tuberculose, pour la période 2011-2013. Lors de la cérémonie de clôture, l'activiste italienne Alessandra Cerioli a demandé: «Monsieur Berlusconi, tenez vos promesses et financez le Fonds!». Si 6,6 millions de personnes peuvent désormais bénéficier d'un traitement antirétroviral, il reste 9 millions de personnes à traiter pour atteindre 15 millions de personnes sous traitement en 2015, l'objectif ambitieux fixé par les Nations Unies en juin dernier.
Peu avant la conférence, le laboratoire Gilead annonçait s'être engagé dans une «communauté de brevets» de traitements contre le VIH. Créé il y a un an par UNITAID (l'organisme qui perçoit la taxe sur les billets d'avion destinée à acheter des antirétroviraux), ce dispositif facilite la production de médicaments génériques, et notamment de comprimés contenant des molécules appartenant à des firmes différentes. L'accord inclut les molécules les plus récentes de Gilead - c'est une bonne nouvelle - mais concerne uniquement les pays les plus pauvres. Le 18 juillet, les firmes BMS et Boehringer Ingelheim annonçaient avoir entamé des négociations pour entrer dans la communauté des brevets. Un groupe d'activiste a réclamé la participation d'Abbott, Janssen et Merck. Sans aucune réponse pour le moment.
Peu d'actions
Enfin, dans cette conférence très scientifique, on peut déplorer le peu de place ou de visibilité pour les actions des associations, notamment les actions en direction des gays. Taper gay ou MSM (les «men who have sex with men») dans le programme ne renvoie qu'à une poignée de résultats! De fait, si tout le monde convenait que la prévention dite «biomédicale» devait impérativement prendre en compte les dimensions sociales et comportementales, aucun intervenant n'est rentré dans le détail. Et les membres des «communautés» concernées (terme consacré dans ces conférences) ont eu très peu la parole à Rome.
Quant à l'importance de lutter contre les discriminations et les stigmatisations que vivent les homosexuels, dans les pays du Sud, mais aussi au Nord, elle a été très peu évoquée. Et ce alors qu'elle est un frein majeur à l'accès aux programmes de prévention, de dépistage, de traitements et de soins, et que le respect des droits humains est indispensable à une lutte efficace contre le sida !
Comme le disait Warren Mitchell, ce ne sont pas les données scientifiques qui changent pas le monde. Mais les programmes et les politiques mis en œuvre par la société civile, les donateurs, les acteurs de terrain et les gouvernements. Dont acte. Il reste du travail...
Par Renaud Persiaux jeudi 21 juillet 2011
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