Catherine Tripon: «La diversité dans l'entreprise, on ne peut pas l'imposer»
Catherine Tripon: «La diversité dans l'entreprise, on ne peut pas l'imposer»
Neuf entreprises ont signé hier matin la charte d'engagement LGBT proposée par l'Autre Cercle. Interrogée par Têtu.com, la porte-parole de l'association, Catherine Tripon, est confiante quant au succès du projet...Réunis au ministère du Droit des femmes, neuf hauts responsables d'entreprises ont signé lundi matin la charte d'engagement proposée par l'Autre Cercle, la Fédération nationale d'association LGBT de lutte contre les discriminations au travail (lire notre article). Catherine Tripon, porte-parole de l'Autre cercle, en dit davantage à Têtu.com.
TÊTU.com: Seulement neuf entreprises ont signé lundi la charte d'engagement…
Catherine Tripon: Dans la vie sociale, le sujet de l'homosexualité peut provoquer des comportements tellement extrêmes – on le voit avec la manifestation du 13 janvier – que beaucoup d'entreprises n'ont pas envie de se mettre en première ligne sur ce sujet là. Pourtant certaines le font, et choisissent de forcer le destin. La lutte contre les discriminations dans les entreprises existe, et pourtant, en France, l'homosexualité reste un thème difficile à aborder. Comme ce n'est pas «visible», on applique la politique du «ce qui ne se voit pas, ça n'existe pas.» Nous avons rassemblé les entreprises qui estiment que les questions LGBT devraient être traitées comme les autres discriminations, ni plus ni moins. Les premiers signataires agissent en pionniers, et ce partenariat reste tout de même historique!
Le climat actuel, le débat virulent sur le projet de mariage pour tous a-t-il pu décourager certaines entreprises de signer la charte?
Je craignais que ce mouvement puisse effectivement rendre certaines boites plutôt frileuses, mais en fait, ça a été plutôt l'effet inverse. Pour ceux qui n'ont pas encore signé, le climat politique médiatique ou religieux n'était pas vraiment la raison du refus, il s'agissait plutôt d'une volonté d'installer doucement la thématique au sein des entreprises, de désinhiber les directions générales. Egalement parce que la vision de l'homosexualité véhiculée à travers les médias, notamment dans les propos des opposants, donne une image terriblement rétrograde et dérangeante des gays et lesbiennes. Et puis, les entreprises ne sont pas égales sur cette question, certains la travaillent depuis des années, comme nos premiers signataires, d'autres commencent tout juste à l'envisager… Il faut leur laisser le temps. La diversité, on ne peut pas l'imposer. Même dans les entreprises ayant récemment obtenu le label Diversité (crée en 2004, les 3.423 entreprises signataires s'engagent à lutter contre toutes les discriminations au travail, ndlr) on sait qu'il y aura un travail pédagogique nécessaire.
Les entreprises signataires prennent-elles toute la mesure de leur responsabilité dans la lutte contre les discriminations?
En s'engageant, elles savent bien qu'on les attend au tournant. Elles vont devoir agir, y compris avec leurs réseau de prestataires, de fournisseurs, de clients, et elles sont prêtes à le faire… Le texte est toutefois très classique. Il s'agit juste de prévenir et de sanctionner s'il le faut les comportements discriminants, insultants, voire violents à l'égard des LGBT, on ne leur demande pas de créer une association. La charte s'inscrit dans une logique moderniste, pour des entreprises éclairées et une civilisation éclairée.
Nous avons atteint les limites de l'action associative, il faut que d'autres puissent porter le sujet. La défense des noirs ça a été porté par des blancs, la défense des femmes par des hommes, et des homosexuels par des hétérosexuels. Il faut sortir de ce communautarisme dans lequel on veut nous enfermer, et maintenant il faut que ce soit les entreprises qui le portent. C'est comme cela qu'on avancera, et sur toutes les discriminations d'ailleurs.
Combien d'entreprises espérez-vous convaincre?
On ne se donne pas d'objectifs. La Charte est signable par les grands groupes et par les PME où il a des procédures d'alerte en interne. Les PME labellisées Diversité ont l'obligation de mettre en place une cellule d'écoute et d'alerte discrimination, c'est pourquoi nous pensons plutôt d'abord à ce type de structure. Il nous faut un interlocuteur interne pour s'assurer du bon respect de la Charte. L'Autre cercle fera une tournée de signatures en région. Je pense que nous triplerons le chiffre cette année, mais je préfère être prudente. Personne n'a de leçon à donner à personne. Ceci étant dit, la nouvelle génération d'élus, de salariés, ou de syndicalistes est plus ouverte sur ces questions, donc je crois que nous parviendrons finalement à neutraliser ce critère.
Photo: Fabien Lemaire.
Par Antoine Patinet mardi 08 janvier 2013
Source : http://www.tetu.com
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