En Norvège, une militante trans’ se bat pour le changement d’état civil sans stérilisation
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En Norvège, une militante trans’ se bat pour le changement d’état civil sans stérilisation
Jusqu'au 13 décembre, une pétition d'Amnesty International est en ligne pour soutenir John Jeanette Solstad Remø, qui explique son combat sur Yagg.
Dans le cadre de sa campagne 10 jours pour signer, Amnesty International apporte son soutien à John Jeanette Solstad Remø, une militante trans’ norvégienne qui se bat pour obtenir son changement d’état civil. Elle refuse de devoir se soumettre à une opération de réassignation sexuelle et à la stérilisation pour obtenir des papiers conformes à son identité de genre.
UNE VIE DANS LA CLANDESTINITÉ
«John» Jeanette? L’utilisation de son prénom masculin interpelle, mais la militante l’a en quelque sorte gardé afin de montrer à la société les difficultés qu’elle subit au quotidien: «Beaucoup trouvent cela étrange que j’utilise John Jeanette, concède-t-elle à Yagg. J’utilise mon nom masculin et mon nom féminin pour insister sur le fait que je ne peux pas obtenir la reconnaissance de mon genre de la part du gouvernement. Pourtant dans la vie de tous les jours, avec mes ami.e.s, on m’appelle Jeanette.» Aujourd’hui âgée de 65 ans, elle a vécu une grande partie de sa vie en cachant sa véritable identité: «J’ai été rejetée par mes parents quand, à quatre ans, j’ai mis une robe et annoncé que j’étais une fille, raconte-t-elle. Le message parental était très clair: “Ne dis plus jamais ça et tu ne porteras plus jamais une robe”. J’ai dit que j’avais compris, ce qui était faux, et j’ai promis de ne plus jamais m’habiller comme une fille. Néanmoins, je savais que je ne pourrai jamais tenir cette promesse. Ma vie secrète avait commencé. Pour survivre, je le faisais de façon clandestine.«Je m’habillais avec des vêtements féminins dès que j’en avais l’occasion, mais je devais faire semblant de me comporter comme un garçon, puis plus tard, comme un homme. On m’a dénoncé une fois, lorsque j’étais adolescente, ce qui m’a presque conduite au suicide. J’ai continué à m’habiller en femme en secret, à sortir la nuit, mais toujours avec la peur d’être reconnue et outée.»
Issue d’une famille de militaires, Jeanette a fait carrière dans la marine et est même devenue capitaine de sous-marin. «A 24 ans, ma femme a découvert que j’étais trans’. Elle ne l’a pas accepté, et quelques années plus tard, nous avons divorcé. Puis je me suis remariée, mais cette fois ma femme a su que j’étais trans’ dès le début de notre relation. J’ai commencé à vivre de plus en plus ouvertement, et quand mes parents sont décédés, je l’ai annoncé au reste de ma famille. A mon grand étonnement, tout le monde m’a accepté comme j’étais!»
«CONTESTER CE SYSTÈME ABSURDE»
Mais alors qu’elle a réussi à vivre ouvertement son identité de femme, Jeanette s’est heurtée à de nouvelles difficultés, l’impossibilité de modifier ses papiers sans que cela ne porte atteinte à son intégrité physique: «En Norvège, on n’est pas autorisé à changer son état civil à moins d’accepter de subir une évaluation psychiatrique, une thérapie hormonale, et une stérilisation irréversible. En somme une castration. C’est ce que je veux remettre en cause. En réalité, il n’y a pas de loi qui établit que cela doit se passer de cette manière. Il s’agit seulement d’une pratique administrative étendue. La raison qui est donnée, c’est que les personnes qui changent d’état civil ne doivent pas pouvoir se reproduire. Je suis la première personne trans’ norvégienne à contester ce système absurde.»
En Norvège, le Rikshospitalet, l’hôpital national d’Oslo est l’établissement par lequel doivent passer les personnes trans’, si elles souhaitent avoir accès à une opération de réassignation. En outre c’est aussi cette institution qui vérifie si les personnes remplissent toutes les conditions pour le changement d’état civil et autorise l’Administration fiscale à changer le numéro national attribué à chaque personne. Cette procédure se pratique depuis les années 1970. D’après les recherches d’Amnesty, les personnes trans’ qui consentent à la stérilisation n’ont pas accès à l’ensemble des informations autour de cette pratique et autour de ses conséquences et n’ont pas la possibilité de préserver leurs gamètes, alors que la législation norvégienne le permet.
DES PROGRÈS EN COURS?
Qu’en est-il des mesures contre la transphobie? De ce côté, la Norvège a fait des progrès très récemment: «La Norvège n’avait pas de législation pour empêcher les discriminations faites aux personnes LGBT avant le 1er janvier 2014», affirme Jeanette. En effet, avant 2014, il fallait avoir subi une procédure de réassignation complète pour être considérée comme victime de discrimination fondée sur l’identité de genre. Mais la militante maintient que la Norvège est de plus en plus ouverte sur la question de la transidentité:«Cela fait vingt ans qu’une personne trans’ a fait son coming-out pour la première fois. A l’époque, la plupart des gens se moquaient et faisaient des blagues sur les pronoms, mais au cours des cinq à dix dernières années, les Norvégien.ne.s ont de plus en plus compris que les personnes trans’ font partie de l’humanité. Mon expérience montre aussi que nous sommes de plus en plus accepté.e.s dans la société.»
Aujourd’hui, une évolution de la législation est peut-être enfin à portée de main: «J’ai porté plainte auprès du Médiateur pour l’Egalité et la non-discrimination, qui a conclu que je suis effectivement discriminée par le gouvernement en ce qui concerne la législation, affirme Jeanette. Que va entreprendre le gouvernement? Les principaux dirigeant.e.s affirment que “quelque chose” doit être fait. Ainsi, ils ont mis en place deux comités: un comité d’experts et un comité d’officiels issus de quatre ministères. Les deux comités vont présenter leurs conclusions en début d’année 2015. Je n’attends rien de moins qu’une nouvelle loi comme en Argentine. Grâce à la pression mise sur la Norvège par Amnesty International, de plus en plus de politicien.ne.s et de partis politiques se rendent compte que cela donne une mauvaise réputation au pays, et qu’il faut qu’il y ait rapidement des lois modernes qui impliquent la protection des droits fondamentaux de la population trans’.»
Si le lecteur ne s’affiche pas, cliquez sur Elle écrit à sa tante Selma à propos d’un secret
Pour soutenir John Jeanette Solstad Remø, vous pouvez signer et partager la pétition d’Amnesty International qui sera adressée au Ministre de la Santé et des Services de soins en Norvège.
Publié par Maëlle Le Corre
Source : http://yagg.com/2014/12/04/en-norvege-une-militante-trans-se-bat-pour-le-changement-detat-civil-sans-sterilisation/
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