Premiers pas dans le monde homo: des personnalités témoignent (5/5)
Premiers pas dans le monde homo: des personnalités témoignent (5/5)
ÉVÉNEMENT. Toute la semaine, 20 personnalités ont témoigné sur TÊTUE pour rendre les femmes qui aiment les femmes un peu plus visibles. Pour finir notre dossier, 11 d’entre elles nous racontent leur premiers pas dans la communauté LGBT.En 2013, alors que la France s'apprête à ouvrir le mariage aux couples de même sexe, on aurait pu espérer la fin de l'invisibilité lesbienne. Et pourtant! Sur tous les films, romans, chansons, séries produits chaque année dans notre pays, combien mettent en scène une histoire entre femmes? Notre société, pas si moderne, feint encore et toujours d'ignorer les couples homos, et tout particulièrement les couples de femmes.
Michelle C. Bonilla
En 2013, une jeune femme qui se découvre lesbienne ou bisexuelle doit faire face à un silence étouffant. C'est frappant dans les témoignages que nous recueillons pour nos articles. On nous parle de la difficulté de vivre dans une société qui présuppose l'hétérosexualité. Ce sont toutes ces femmes qui, aux premiers émois, ont l'impression d'être seules au monde. Avant de se rendre compte, plus tard, à quel point l'expérience est banale, bien qu'invisible.
Pour TÊTUE, 20 personnalités out ont accepté de nous livrer un bout de leur histoire. Elles sont actrices, musiciennes, journalistes, écrivaines, avocates, humoristes... Preuve, pour ceux qui en doutaient encore, que l'on peut accomplir de grandes choses tout en assumant son amour des femmes. Ces paroles sont d'autant plus précieuses qu'elles interviennent à un moment où l'homophobie s'est libérée avec le débat sur le mariage.
Toute cette semaine, vous avez pu découvrir sur TÊTUE ces témoignages, rares et forts. Après nos article sur le coming out, sur la réalisation de son orientation sexuelle, sur la première histoire avec une femme et la gaypride, 11 personnalités nous racontent aujourd'hui, pour finir ce dossier, leurs premiers pas dans le monde homo.
Actrice américaine (Urgences, Dr Quinn femme médecin)
«Le premier pas que j'ai fait dans le milieu homo était vraiment énorme! Je suis allée à une soirée appelée "Women's Night". C'était organisé par le centre LGBT de Los Angeles pour remettre un prix à la chef cuisinière Susan Feniger, qui est aujourd'hui une de mes très bonnes amies. C'est à cette soirée que j'ai rencontré ma compagne. Ma première sortie dans le milieu lesbien était donc la bonne!»
Soraya Garlenq
Actrice, qui évolue notamment au sein du groupe Airnadette.
«Je suis allée dans une boite de nuit homo, à Bordeaux, accompagnée par un copain gay qui m'avais promis qu'il y aurait des filles. Mais il y en avait très peu. Ça a été un peu brutal par rapport à mes attentes. Je me suis dit "on est beaucoup moins nombreuses que les garçons, qu'est-ce qu'il se passe? Où sont les filles?!".
J'ai ensuite trouvé quelques bars féminins à Bordeaux, qui ont depuis disparu. C'était agréable de se retrouver dans un lieu où il y avait des femmes comme moi. Je me suis rendu compte que les filles et les garçons ne fréquentaient pas forcément les mêmes lieux. Après, je ne suis pas beaucoup sortie, je l'ai fait au moment où il le fallait, pour côtoyer les gens. Je pense que tout le monde passe par là. On en a besoin mais on peut ensuite s'en éloigner un peu.»
Caroline Mécary
Avocate au barreau de Paris et co-présidente de la Fondation Copernic. Dernier ouvrage: L'amour et la loi
«Le premier bar où je suis allée, c'était la Champmeslé. Je devais avoir 16 ou 17 ans. Et la première boîte, ce fut le mythique Katmandou où je me suis rendue par curiosité, évidemment, et parce que je savais que je serais dans un univers bienveillant. Il y avait ce mélange: le sentiment d'être dans un univers interdit et j'y allais quand même.»
Beatriz Preciado
Philosophe. Dernier ouvrage: Pornotopie, Playboy et l'invention de la sexualité multimédia
«Dans la ville où j'habitais en Espagne, quand j'étais jeune, il n'y avait pas de mouvement homo ou féministe. Mais un jour j'ai trouvé sur un marché aux puces un vieil exemplaire en français d'un livre de Monique Wittig, Le corps lesbien. Je l'ai acheté à cause du mot "lesbien" affiché sur la couverture. Je devais avoir 15 ans. Puis j'ai commencé à chercher d'autres livres de Monique Wittig. Ça a commencé comme ça.
Le deuxième contact que j'ai eu avec la communauté homo et trans, c'était dans un bar à Madrid, où il y avait des trans et des travestis. Je suis rentrée dans ce bar et c'est la première fois que je me suis sentie chez moi.»
Juliette
Chanteuse. Dernier album: No Parano.
«Comme je n'ai pas eu de problème avec ma famille ou avec mes amies par rapport à mon homosexualité, je n'ai pas eu besoin de rejoindre quelque chose de communautaire. Ça s'est limité à un mouvement féministe à Toulouse. Dans ma carrière de séductrice, je pense que je n'ai dragué et fréquenté que des femmes hétéros (rires). J'ai dragué là où je me trouvais. C'est un peu spécial mais c'est vrai!
Je n'ai pas eu besoin, à aucun moment de ma jeunesse, d'aller rejoindre une "communauté" lesbienne. En plus je suis une femme de 50 ans, donc quand j'en avais 20, je peux vous dire que les communautés lesbiennes, elles n'étaient pas très nombreuses, surtout à Toulouse! Après, je sais que pour des gens ça peut être très aidant, et je remercie les associations, ceux qui sont à l'écoute des autres, parce qu'ils font le travail d'une famille.
Avec ma première petite copine, à la fin des années 70 à Toulouse, on marchait main dans la main et on se bécotait, ça ne gênait personne. A cette époque là c'était quand même cool à Toulouse, plus que ça ne l'est maintenant, finalement. En ce moment on voit bien qu'on a la droite la plus bête du monde. Si on avait encore un doute, là on peut en être sûr!»
Brigitte Kernel.
Ecrivaine. Dernier ouvrage: Andy.
«Le mot "communauté" m'interroge dans le sens où il délimite et que tout mon travail, dans mes romans, consiste à éviter au maximum les barrières, les étiquettes. J'essaie de banaliser les amours entre personnes de même sexe en me disant que peut être un jour, espérons-le, on ne parlera plus des homos comme des gens "différents" mais comme des "semblables". Un monde de rêve, c'est sans doute naïf de ma part, où les communautés n'existeraient plus que pour faire perdurer des traditions, des fêtes. Où l'idée de se battre serait évanouie car on en aurait plus besoin. Mes pensées sont roses et chantilly, je l'admets... (Rires) Je reste très ado sur ces points...
Je me souviens, il y a maintenant plus de dix ans, pour des personnes d'origines différentes, on disait "des couples mixtes", comme il y a plus de vingt ans on parlait des enfants de parents séparés en les qualifiant d'"enfants de divorcés". La communauté est plus qu'utile quand il s'agit de combat. En, revanche, dés que cela passe dans la vie commune et habituelle le mot devrait être ré-inventé. Et il faudra aussi, pour chacun d'entre-nous, nous ré-inventer avec ces nouveaux acquis...
Pour mes premiers pas, tout a commencé par la revue Masque que je lisais autrefois et qui m'a concernée bien évidemment. J'avais environ 18 ans. J'ai été et suis d'une admiration sans borne pour les militantes. Sans elles et sans eux, pour les garçons, on ne parlerait pas de mariage, le pacs n'aurait pas été voté... Aujourd'hui, j'aimerais faire partie d'une association qui aide les parents à comprendre leurs enfants...
Sinon, pour ces "premiers pas" comme beaucoup, j'ai fréquenté le Katmandou et, à l'époque, m'y sentais à l'aise. Ayant, justement, besoin d'une "communauté"... Ce n'étais pas facile de vivre sereinement sa vie dans les années 80... Surtout en province. A Paris, c'était déjà plus simple. Je pense que la communauté est faite pour accueillir et entourer, mais qu'ensuite il s'agit d'ouvrir les ailes. Enfin, je ne sais pas. Je n'aime pas les cadres. Et j'ai certainement tort. Car, je suis consciente qu'un retour de bâton est possible dans l'avenir et qu'il faut protéger ce qui sera voté.»
Marinette Pichon
Ex-capitaine de l'équipe de France de football. Consultante pour France Télévision.
«Lors des soirées que j'ai pu faire aux USA comme en France, les choses étaient déjà "établies" me concernant. Donc c'est assez tranquillement que j'ai découvert ce milieu, vivant, rythmé et surtout sans jugement. C'est-à-dire que les échanges s'y font facilement et c'est un régal de se sentir détendue, relax, sans apprehension d'être regardée à longueur de soirée car différente! En revanche, pour ce qui est des interviews à la presse homo, j'ai donné la première très tardivement, pour TÊTUE en fait, à quelques semaines de prendre mon fils dans mes bras...»
Anne-Laure Sibon
Chanteuse, révélée par la «Star Ac'» en 2001. Dernier album: Droit devant.
«Je m'en souviens très bien! La première boîte où je suis allée c'était le Pulp, j'avais 17 ans. C'était un samedi soir, j'y suis allée avec une bande de copines de mon club de tennis. On était toute une équipe! J'ai le souvenir d'une soirée géniale. Ce qui m'a vraiment plu c'était de voir des jolies filles de tous les styles: il y avait des filles plutôt sportives, d'autres plutôt féminines. Je me souviens très bien qu'il y en avait même deux en robe accoudées au bar. Ça m'avait marquée! Bref, chacun était comme il était.
Ça m'a fait du bien de me dire: "Ouf! Je ne suis pas obligée de rentrer dans un stéréotype." C'est à ce moment là que je me suis rendue compte que les stéréotypes, c'est ce que les mauvaises langues ont colporté en disant qu'une lesbienne porte forcément un baggy, a des tatouages partout et les cheveux hyper courts. Alors qu'en fait, si tu t'approches un peu, tu vois bien que le charme, la beauté, la féminité s'expriment différemment.
Tu te rends compte dans ce genre d'endroits qu'il y a encore des filles qui ne s'assument pas très bien, d'autres qui ont l'air heureuses et épanouies. Mais tu comprends surtout que ce n'est pas parce que tu es lesbienne que tu dois rentrer dans une case. C'est à chacun de se construire et de se trouver.»
Milkymee
Chanteuse. Dernier album: Borders.
«J'ai compris assez tôt que j'aimais les filles vers 13-14 ans. J'ai d'abord acheté un numéro de TÊTU -et je ne dis pas ça pour plaire à TÊTU mais c'était la seule référence que j'avais. Je l'avais caché sous mon matelas. Et j'écoutais Radio FG en cachette dans ma chambre. Donc, mes premiers pas dans la communauté, c'était plutôt super intime et à ma petite échelle.
A l'époque, fréquenter des bars, des soirées de filles, ça m'effrayait au plus haut point. Je ne suis pas du tout passée par là. Ma première copine je l'ai rencontré au lycée. Maintenant je vais plus aisément dans les bars ou les soirées, je trouve ça super chouette. Mais mes premiers pas, ça n'a pas été très facile pour moi, ça a été beaucoup de timidité.»
Shirley Souagnon
Humoriste.
«La première fois que je suis entrée dans un bar lesbien, c'était bien après ma première relation avec une fille. Je ne connaissais pas forcément beaucoup d'homos, donc je traînais dans des bars hétéros... ce qui ne m'empêchait pas de draguer!
C'est dans un bar ou une boite de Paris que j'ai découvert le milieu lesbien. A l'instant où je suis entrée, j'ai eu l'impression que tout le monde me regardait! C'était marrant, même si je ne me suis pas franchement sentie connectée au lieu et aux gens, je me sentais comme un "article" parmi tant d'autres...»
Kiyomi McCloskey
Chanteuse du groupe canadien Hunter Valentine. Dernier album: Collide and Conquer
«J'étais encore au lycée la première fois que je suis allée dans un bar homo. J'avais l'habitude de me rendre à un bar qui s'appelait le "Crews and Tangos" à Toronto, où je me faufilais par l'entrée de service. J'ai rencontré beaucoup de jeunes homos dans cet endroit, c'était une période de ma vie vraiment exaltante.
J'ai la chance d'avoir des parents qui me soutiennent beaucoup. A la maison, mon homosexualité n'a jamais posé aucun problème. J'essaye toujours de me rappeler que ça n'a pas été aussi facile pour tout le monde. Ça me donne envie d'aider et de conseiller les jeunes homos.»
Lire également les autres volets de notre dossier témoignages:
Coming out, gaypride, premier amour... Pour TÊTUE, 20 personnalités témoignent
Découverte de leur homosexualité: des personnalités témoignent (2/5)
Première histoire avec une femme: des personnalités témoignent (3/5)
Première gaypride: des personnalités témoignent (4/5)
Propos recueillis par Marie Kirschen, Mélanie Vives, Myrtille Rambion et Marie Slavicek.
Photo Milkymee: Sarah Bastin.
photo Caroline Mécary: Studios Harcourt.
Photo Beatriz Preciado: Léa Crespi.
Photo Milkymee: Sarah Bastin.
Photo Brigitte Kernel: David Ignaszewski/Koboy/Flammarion
Photos: DR.
Par Rédaction vendredi 15 février 2013
Source : http://www.tetu.com
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